lundi 12 mars 2018

Les aventures de la famille Troche - I : du Pays de Caux au littoral Dieppois

Les aventures de la famille TROCHE - Partie I : du Pays de Caux au littoral Dieppois

Mes recherches actuelles concernent l'ascendance de l'une de mes ancêtres, Juliette Troche, d'origine normande mais dont le nom sonne bourguignon. Ses ancêtres, des marchands perruquiers qui travaillèrent aussi dans les manufactures de tabac et la marine, n'avaient pas encore fait l'objet de recherches poussées. Cette famille au drôle de nom nous emmène jusqu'à Dieppe où elle vécut peu de temps avant la Révolution.

Une ancêtre normande au nom bourguignon

 

Juliette TROCHE - Archives familiales
Juliette Troche est née en 1813 à Auffay, une bourgade médiévale du pays de Caux en Haute Normandie, autrefois nommée Alta Fagus, qui fut incendiée par les Anglais lors de la Guerre de Cent Ans puis par les Bourguignons en 1472 avant d'être occupée par les armées royales au XVIe siècle. Ce rappel historique, qui pourrait passer pour anecdotique, ne l'est pas : Troche et Bourguignons auraient un lien.

Troche viendrait selon les étymologies que l'on trouve en ligne du latin Tradux et serait localisé en Bourgogne, à plusieurs centaines de kilomètres du Pays de Caux. Je ne vois pas comment un patronyme bourguignon aurait pu se retrouver en Normandie sans avoir un lien avec les événements racontés plus haut. Il s'agit cependant de mon hypothèse personnelle.

Avant d'attaquer le vif du sujet, je me dois de vous préciser mon lien de parenté avec Juliette Troche. Elle est la grand-mère paternelle de Valentine Trevet qui est elle-même la grand-mère paternelle de Jacques Lehoux, mon grand-père paternel. En d'autres termes, Juliette Troche est l'une de mes trente deux arrière-arrière-arrière-arrière-grands-mères et appartient à cette génération qui connut une grande partie du XIXe siècle et les progrès qui vont avec.



Une erreur d'âge et un blocage...

 

 

Extrait de l'acte de décès de Louis Charles TROCHE - décembre 1854 - Auffay - Archives en ligne de la Seine-Maritime


Le père de Juliette, Louis Charles Troche, est lui-même le fils d'un certain Charles Antoine Troche. Rien de bien particulier jusque là me diriez-vous. Pourtant, il m'a été impossible, ces dernières années, de remonter plus loin. Et pour cause : aucune trace de ce Charles Antoine Troche, ni à Auffay, ni à Luneray bien qu'il y résidait lors du mariage de son fils en 1803. Il avait alors 45 ans.

Extrait I de l'acte de mariage TROCHE - LECLERC - janvier 1803 - Auffay - Archives en ligne de la Seine-Maritime

Extrait II de l'acte de mariage TROCHE - LECLERC - janvier 1803 - Auffay - Archives en ligne de la Seine-Maritime

L'acte de baptême de Louis Charles Troche ne livre guère plus d'informations. Je décide de m'en remettre aux sites généalogiques... D'après certaines sources en ligne, Louis Charles Troche aurait été le fils de Charles Antoine Troche, perruquier, né vers 1739, décédé après 1803, et d'Anne Angélique Le Roi, née vers... 1739... et décédée en 1820. Décès duquel aurait été témoin son fils Louis Charles Troche. Cette Anne Angélique Le Roi me paraissait trop vieille pour être la mère de Louis Charles Troche (quarante sept ans en 1786...) Et comment, en ne connaissant que les actes de baptême et de mariage de Louis-Charles Troche, était-il possible d'affirmer que son père Charles Antoine était né vers 1739 alors qu'il était âgé de quarante cinq ans en 1803 ? Je mis de côté cette famille là pour me préoccuper d'autres ancêtres, sans toutefois adhérer à l'hypothèse reprise par tous les arbres consultés en ligne et qui me paraissait quasiment impossible.

J'ai récemment réouvert ce vieux dossier, si vous me passez l'expression. Je décide alors de consulter l'acte de décès de Anne Angélique Le Roi,  apparemment responsable de ce qui me semblait être une fausse hypothèse ou une approximation douteuse. Mon intuition se confirma à la lecture de l'acte :

Acte de décès d'Anne Le Roi - février 1820 - Auffay - Archives en ligne de la Seine-Maritime

Premier constat : il n'y a pas d'Angélique Le Roi mais seulement Anne Le Roi, qui est cependant bien née vers 1739... et de ce fait sûrement trop vieille pour être la mère de Louis Charles Troche, né en 1786. Le défunt mari, nommé Nicolas Jacques Carlu, ne correspond pas non plus. Et, cerise sur le gâteau, Louis Charles Troche, alors âgé de trente quatre ans, est bien mentionné comme témoin lors de la rédaction de l'acte de décès, qu'il signe, mais seulement en tant qu'ami de la défunte et non pas en tant que fils. Ce n'est pas la première fois que les versions en ligne les plus courantes des ascendances de certains ancêtres s'avèrent erronées. Mon arbre et ses quelques milliers d'individus n'en sont probablement pas exempts. Je m'attarderais peut-être, si j'en ai le temps, sur l'ascendance de cette dame, Anne Le Roi, amie de l'un de mes ancêtres et née de père inconnu. Sa vie n'a sans doute pas été simple...


 Quand les vieilles cartes viennent à ma rescousse !



Mais qu'en est-il de mes ancêtres Charles Antoine Troche et Angélique Le Roy ? Où vivaient-ils après 1803 et surtout, où et quand sont-ils décédés ? Leur acte de mariage étant introuvable, je suis de nouveau bloqué même après avoir confirmé mon hypothèse de départ... Heureusement, ma vieille amie nommée carte de Cassini va une fois de plus me tirer de cette impasse !

Carte de Cassini - https://www.geoportail.gouv.fr/donnees/carte-de-cassini - centrée sur Luneray (en orange)
Louis Charles Troche s'est installé à Auffay dans la décennie qui suivit son mariage. Cela ne signifie pas pour autant que ses parents l'ont accompagné. J'ai alors essayé d'extraire quelques informations de la situation géographique de Luneray : située à quelques heures de marche du chemin qui relie Dieppe au Havre, la commune compte un petit millier d'habitants. Ce doit être, à l'aube du XIXe siècle, à peine suffisant pour garantir l'équilibre du commerce de Charles Antoine Troche qui était perruquier. Ce dernier, âgé de quarante cinq ans, et sa femme, probablement du même âge ou plus jeune, ont très bien pu vivre jusque dans les années 1840.

N'ayant pas d'autres idées, je me mets à farfouiller dans les communes les plus proches de Luneray que je liste et restreins à celles qui "touchent" littéralement la petite bourgade et ses fermes, de sorte d'obtenir la liste suivante : Avremesnil, La Gaillarde, Brachy et Gourel.


Carte de l'état-major - https://www.geoportail.gouv.fr/carte - centrée sur Luneray
Avant de poursuivre, je m'aperçois en écrivant l'article qu'il y a marqué "Luneray ou les deux portes". Cela m'intrigue et il faudrait que j'y revienne plus tard. Je commence alors ma recherche... il ne semble pas y avoir d'éléments concluants à Avre... Avremesnil. J'ai au moins appris à dire ce nom assez difficile à prononcer. Je ne suis pas sûr qu'il faille prononcer le "s" dans "mesnil" mais dans ma région je pense que les gens le prononceraient... Enfin, bref, revenons-en au Pays de Caux où vécurent les Troche.

Commune suivante, la Gaillarde, encore un nom pittoresque à mon goût puisque la seule Gaillarde dont j'avais jusque là connaissance était Brive-la-Gaillarde, vers laquelle je suis passé au retour de vacances si je ne m'abuse... Peu importe. La Gaillarde est, si j'en crois les légendes, l'une de ces communes propices aux contes de fées et à l'imagination. Des puits rebouchés se trouvant dans ses plaines abriteraient des trésors. Cela ne me semble pas impossible en ce pays de pirates et encore moins ici, à la Gaillarde, village ancien qui n'est séparé du littoral que par huit kilomètres. Et là, comme par enchantement, voilà que je me retrouve, tel un pirate à la recherche d'un trésor enfoui, face à l'acte que je cherchais. Et deux pour le prix d'un : Charles Antoine Troche et Marie Angélique Le Roy y sont tous les deux.


Acte de décès de Charles Antoine Troche - mai 1838 - La Gaillarde - Archives en ligne de la Seine-Maritime

Acte de décès de Marie Angélique Leroy - décembre 1839 - La Gaillarde - Archives en ligne de la Seine-Maritime
Ces actes sont de véritables trésors inespérés pour le pirate généalogique avide d'actes et de découvertes que je suis ! Commençons par celui de Charles Antoine Troche, en date du 8 mai 1838. Nous y apprenons que Charles Antoine Troche, âgé de quatre-vingt-trois ans, époux de Marie Angélique Leroy, n'est plus perruquier mais trameur. Son nouveau métier était centré sur un élément du métier à tisser, la navette. Il s'agit là d'un exemple classique de baisse de niveau de vie suite à la période révolutionnaire. Les perruques étaient tout simplement moins utilisées dans les années 1830 qu'au siècle précédent. Les autres informations concernent les parents du défunt, Jean Nicolas Troche et Anne Leprince, le mariage avec Marie Angélique Leroy, qui a eu lieu le 8 août 1785 à la Gaillarde, ce qui semble concordant avec la naissance de Louis Charles Troche en 1786, et enfin, son lieu de naissance : Dieppe !

Celui de son épouse Marie Angélique Leroy, en date du 22 décembre 1839, est également riche en informations : née à Saint-Pierre-le-Vieux en 1766 (que j'ai entouré sur la carte de Cassini), elle est la fille de Jean Leroy et de Marie Guesdon dont les lieux de décès sont précisés. Le lieu et la date de mariage correspondent avec ceux énoncés dans l'acte de décès de son époux. Nous apprenons par ailleurs que Marie Angélique Leroy, qui quelques années auparavant ne travaillait pas ou aidait son mari, était devenue baleineuse. Je ne me suis pas trop attardé sur cette profession pour le moins originale, mais à ma connaissance, le baleinier est l'embarcation utilisée pour la pêche de la baleine.

Les prochaines aventures de la famille Troche nous emmèneront dans le Dieppe prérévolutionnaire. Ce sera l'occasion de découvrir ce port magnifique mais aussi les manufactures de tabac et, bien évidemment, de nouveaux ancêtres !

Si vous voulez en savoir plus sur mes ancêtres et le commencement de mes recherches, c'est par ICI !

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